Une situation qui s’améliore, des préoccupations grandissantes.
Montréal, le 17 mars 2009 – Le Conseil d’éthique de l’industrie québécoise des boissons alcooliques a rendu public ce matin son deuxième rapport annuel sur les pratiques des membres de l’industrie en matière de communication, de commercialisation et de promotion de l’alcool.
Le Conseil d’éthique a reçu des plaintes et des commentaires pertinents à son mandat de 211 personnes et organismes, une augmentation de 20 % par rapport à 2007. Certaines plaintes portant la signature de dizaines et parfois de centaines de personnes, on peut estimer à plus d’un millierle nombre de personnes qui se sont adressées à lui en 2008.
Il faut signaler que 151 plaintes concernaient le seul « calendrier des plus belles filles de l’Est du Québec », de la brasserie Molson. En excluant cette commandite de la brasserie, le nombre de plaintes baisse à 60.
Dans la plupart de ces cas, il s’agissait de plaintes précises contre des entreprises et elles concernaient essentiellement la publicité ou des activités promotionnelles. Mais dans 26 cas, il s’agissait de témoignages généraux de simples citoyens qui faisaient part de leur rejet du sexisme dans la publicité de certains annonceurs, particulièrement les brasseries.
En ce qui a trait aux plaintes concernant une entreprise spécifique, Molson-Coors arrive en tête avec un total de 165 plaintes sur 182, soit plus de 90 % des plaintes. Outre le calendrier, 14 autres plaintes contre Molson-Coors ont été soumises au Conseil, lequel a estimé que ces campagnes, messages et commandites étaient effectivement contraires aux valeurs et orientations du code d’éthique.
Le conseil a reçu quatre plaintes à l’encontre de deux campagnes de la brasserie Labatt, qui représente aussi Budweiser. Il a estimé que les deux campagnes visées ont exploité le corps féminin aux fins de vendre de la bière. Il a fait part de son opinion à la brasserie Labatt et l’a invitée à mener une réflexion sur les arguments qu’elle utilise pour vendre ses produits.
Sept plaintes concernaient des pratiques promotionnelles de bars. Deux d’entre elles ont été directement réglées par le conseil et cinq autres ont été référées à la RACJ puisqu’elles concernaient les règlements en vigueur au Québec. Il y a eu six interventions générales déplorant que la SAQ fasse des promotions et une plainte spécifique pour promotion excessive qui n’a pas été retenue. Par ailleurs, le conseil n’a pas retenu quatre plaintes faites à l’encontre de Bacardi, Grand Marnier et Éduc’alcool.
Le Conseil a également reçu des messages reflétant des inquiétudes ou des interrogations de citoyens au sujet de la place qu’occupe l’alcool dans les médias et particulièrement à la télévision, ce qu’ils ont qualifié de banalisation de la consommation.
Une amélioration sensible
Malgré le contexte difficile dans lequel il doit œuvrer, le Conseil ne peut que se féliciter des trois constats qui s’imposent à l’issue de sa deuxième année d’existence.
« De fait, bien qu’il reste encore beaucoup de chemin à parcourir, la situation générale s’améliore. Même les grandes brasseries, qui n’adhèrent pourtant pas au code d’éthique, ont indiscutablement réduit le sexisme dans leur communication et leur promotion. Le ressac causé par le « calendrier des plus belles filles de l’Est du Québec » de Molson et le mouvement de colère qu’il a provoqué y sont sans doute pour quelque chose. Il reste à espérer que ce répit n’est pas temporaire et qu’il est le reflet d’une réelle prise de conscience », a déclaré le président du conseil d’éthique, Me Claude Béland.
« En outre, en excluant les plaintes liées à ce calendrier, le nombre des motifs d’intervention a nettement diminué par rapport à l’an dernier et nous nous en réjouissons. Certes, nous sommes encore loin de la perfection et il reste encore des pratiques publicitaires et promotionnelles déplorables. Le sexisme et l’exploitation de la sexualité n’ont malheureusement pas encore tout à fait disparu et la tentation d’y recourir est toujours présente », a-t-il poursuivi.
« Enfin, la question de la place de l’alcool dans notre société se pose de plus en plus. Plusieurs de nos concitoyens se sont adressés au Conseil d’éthique pour lui faire part de leurs préoccupations sur le principe même des promotions et des rabais sur les prix de l’alcool. Plusieurs ont aussi déploré la présence, qu’ils estiment envahissante, de produits alcoolisés dans l’univers télévisuel et cinématographique du Québec », a également souligné Me Claude Béland.
Un impact certain
Le Conseil est conscient des attentes qu’il a soulevées. Il n’ignore pas que ses interventions ont eu un impact certain. Toutefois, bien qu’il ait le pouvoir de sanctionner par le blâme public, il n’a pas adopté une approche répressive, mais s’est plutôt fait un devoir de chercher, par le dialogue et la persuasion, à convaincre les contrevenants de modifier leurs pratiques. Bien lui en a pris : aucun des adhérents au code d’éthique n’a refusé, au cours de cette deuxième année, de se conformer au code d’éthique après les interventions du Conseil.
Si le Conseil se réjouit de l’évolution – dans la bonne direction – de la communication et des pratiques commerciales des grandes brasseries, il déplore leur non-adhésion au code qui entraîne à sa suite celle des microbrasseries. Cette année encore, le Conseil s’est empêché de les blâmer publiquement, même si celles-ci ont été, bien malgré lui, sous les feux de la rampe. Il souhaite plus que jamais qu’une réflexion poussée se tienne dans leurs rangs et qu’un changement intervienne dans leurs orientations. Elles ont fait un premier pas, il leur reste à compléter leur démarche et à adhérer volontairement au code d’éthique.